Billets, nos droits

Quelques réflexions sur la réforme constitutionnelle …

Le 7 juillet prochain, le congrès – c’est à dire la réunion de nos 577 députés et 331 sénateurs- se réunira à Versailles pour examiner le projet réforme de la constitution dont le contenu est actuellement débattu à l’assemblée nationale.
Le sujet pourtant mérite mieux que la succession d’annonces qui est faite les médias ces derniers jours. A entendre le contenu des amendements qui viennent d’être adoptés (par exemple celui relatif aux langues régionales) on peine en effet à comprendre la réelle importance de ce qui est en train de se décider.
La notion de constitution tout d’abord mérite qu’on s’y attarde un peu.
Selon la définition chère au doyen Favoreu la constitution c’est « la norme de production de normes », c’est à dire en termes plus simules la règle qui définit les conditions de création, de destruction ou de dérogation pour toutes les autres règles.

A la lecture de cette définition très juridique on comprend plus aisément l’intérêt éminemment politique de cette révision constitutionnelle. Il s’agit de redistribuer les cartes, de modifier les attributions des différents titulaires du pouvoir en France.
A l’instant, le combat le plus important n’est pas le bras de fer -certes réel- entre gauche et droite, mais bien celui qui a lieu depuis plusieurs semaines entre un président de République affaibli par de sondages moroses et la défaite des municipales et un parlement ragaillardi par cette situation inespérée.
Le « référendum d’initiative populaire«  qui a été adopté cette nuit à l’assemblée est à ce sujet particulièrement emblématique. Cette disposition qui ne figurait pas dans le projet du gouvernement a été proposée à l’initiative des députés et permet l’organisation d’un référendum à l’initiative d’un cinquième des membres du Parlement soutenue par un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales sonne le glas d’une époque à laquelle seul le président de la République pouvait convoquer un référendum.

La constitution de la V° république a ceci de particulier qu’elle a instauré en France un régime « semi-parlementaire« , c’est à dire une régime hybride entre le système parlementaire (qui existe en Grande Bretagne) et le système présidentiel (comme aux états unis).
Nous sommes une fois de plus à la croisée des chemins. A chaque pas en avant cette réforme tente de faire basculer nos institutions vers un système ou un autre.
L’issue de cette bataille (qu’il en sorte quelque chose ou pas d’ailleurs) aura une influence majeure sur les décisions et ceux qui seront amenés à les prendre dans les années à venir.

Il est assez désolant de constater à quel point des réformes mineures (service minimum, retraites) peuvent mobiliser l’opinion alors que notre démocratie évolue d’une manière importante dans une indifférence relative.
Je n’aimes pas les phrases toutes faites mais cette fois l’adage me semble assez opportun : « le diable est dans les petites choses »

Pour ceux qui souhaitent aller plus loin vous pouvez lire :
par ici le texte du « projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République »
– par ici le dossier complet sur le site de l’assemblée nationale
– et par là une interview de Pierre Mazeaud pour Les Echos
et hop, nos droits

Sarkozy redevient sérieux et retire sa plainte contre le Nouvel Obs.

On se souvient tous de l’affaire du SMS, ce fameux « si tu revient j’annule tout » qui aurait été envoyé par N. Sarkozy à son ex-épouse très peu de temps avant de dire oui à l’actuelle Mme Sarkozy avant d’être publié sur l’avatar numérique du Nouvel Observateur.
On se souvient aussi de la plainte avec constitution de partie civile pour « faux et usage de faux » qui s’en était suivi.
Je n’ai pas cru un seul instant que cette plainte puisse aboutir.
Enfin, les faits me donnent raison puisque N. Sarkozy vient donc de retirer sa plainte.
Il est vrai qu’elle n’avait de toute manière aucune chance d’aboutir.

Petite précision à caractère strictement juridique :
L’Article 441-1 du code pénal, c’est à dire le texte auquel se référait nécessairement la plainte déposée par M. Sarkozy prévoit que :
« Constitue un faux toute altération frauduleuse de la vérité, de nature à causer un préjudice et accomplie par quelque moyen que ce soit, dans un écrit ou tout autre support d’expression de la pensée qui a pour objet ou qui peut avoir pour effet d’établir la preuve d’un droit ou d’un fait ayant des conséquences juridiques.
Le faux et l’usage de faux sont punis de trois ans d’emprisonnement et de 45000 euros d’amende. »

Or pour que ce texte soit applicable, il faut que soit prouvé ;
– que le SMS n’a jamais été envoyé (i.e. qu’il y a bien eu altération frauduleuse de la vérité),
– que la fabrication de cet éventuel faux SMS ait pu avoir « pour objet ou pour effet d’établir la preuve d’un droit ou d’un fait ayant des conséquences juridiques ».

Manifestement, le deuxième postulat ne correspond en rien à l’affaire puisque la publication de l’information n’entraine aucune conséquence juridique au bénéfice du Nouvel Observateur.

D’évidence, le fondement choisi à l’appui de la plainte est erroné.
La chose est d’autant plus troublante celle-ci aurait raisonnablement pu invoquer le délit de ‘diffamation’, qui aurait bien mieux correspondu.

Puisqu’on ne peut pas supposer que l’avocat de N. Sarkozy ait pu ignorer ce texte qui figure au programme des étudiants de droit de deuxième année on ne peut que supposer que des raisons impérieuses l’ont poussé à faire le choix de ce fondement juridique.

Mais lesquelles ?
Supposition en l’air : pour permettre l’ouverture d’une enquête sur une fuite éventuelle dans l’entourage du chef de l’état sans que l’on puisse lui reprocher d’organiser une vendetta à caractère strictement personnel…

Mais cela revient donc à supposer également que le SMS aurait bien été envoyé?

AH tiens? Je n’y avais pas pensé…

nos droits

La détention provisoire

Voici une très rapide présentation des principes qui ont été appliqué par les magistrats dans la décision de ce matin :

Le régime des personnes mises en examen est fixé par l’article 137 du code de procédure pénale qui dispose que :

« La personne mise en examen, présumée innocente, reste libre. Toutefois, en raison des nécessités de l’instruction ou à titre de mesure de sûreté, elle peut être astreinte à une ou plusieurs obligations du contrôle judiciaire. Lorsque celles-ci se révèlent insuffisantes au regard de ces objectifs, elle peut, à titre exceptionnel, être placée en détention provisoire ».


L
a détention provisoire est ordonnée par le juge des liberté et de la détention. Ce magistrat statue par une ordonnance qui doit comporter l’énoncé des considérations de droit et de fait sur le caractère insuffisant des obligations du contrôle judiciaire et le motif de la détention. (article 137-3 du code de procédure pénale)

Elle doit répondre aux exigences de l’article 144 du code de procédure pénale qui prévoit : « La détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que s’il est démontré, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure, qu’elle constitue l’unique moyen de parvenir à l’un ou plusieurs des objectifs suivants et que ceux-ci ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire :

1° Conserver les preuves ou les indices matériels qui sont nécessaires à la manifestation de la vérité

2° Empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ;

3° Empêcher une concertation frauduleuse entre la personne mise en examen et ses coauteurs ou complices ;

4° Protéger la personne mise en examen ;

5° Garantir le maintien de la personne mise en examen à la disposition de la justice ;

6° Mettre fin à l’infraction ou prévenir son renouvellement ;

7° Mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l’ordre public provoqué par la gravité de l’infraction, les circonstances de sa commission ou l’importance du préjudice qu’elle a causé. Ce trouble ne peut résulter du seul retentissement médiatique de l’affaire. Toutefois, le présent alinéa n’est pas applicable en matière correctionnelle ».

Enfin, « La détention provisoire ne peut excéder une durée raisonnable, au regard de la gravité des faits reprochés à la personne mise en examen et de la complexité des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité . (article 144-1 du code de procédure pénale)