Billets, coup de gueule, politique

Dieudonné et la théorie du complot

L’obsession que Dieudonné  nourrit à l’égard des juifs ne fait plus rire personne.
Déjà lorsqu’il avait offert une tribune au négationniste Robert Faurrisson ses intentions ne faisaient aucun doute.
Je l’avais écrit à l’époque et je le pense de plus fort ; le négationnisme est nécessairement antisémite, Dieudonné n’avait donc pas besoin de préciser quoi que ce soit.

Pourtant, dans la suite logique de sa démarche il vient de faire une nouvelle déclaration, à la portée éminemment politique puisqu’elle est aussi une entrée en campagne électorale.
Oui, Dieudonné entend proposer une 
candidature « antisioniste » et « anticommunautariste » aux élections européennes en Ile-de-France [source]
qui ne trompe personne tant le discours est une fois de plus transparent.

« Nous devons nous battre de l’extrême droite à l’extrême gauche contre ce centre qui détient le pouvoir depuis très longtemps, contre le système béké en réalité, a affirmé Dieudonné. Parce que c’est le même système béké qui est en France et je pense l’avoir localisé. »

Voilà incontestablement de quoi alimenter la théorie idiote selon laquelle l’extrême gauche et l’extrême droite seraient taillées dans le même moule. (totalitaire)
Certes je reconnais à l’extrême gauche française un handicap majeur, un défaut de naissance qui tient à son incapacité à transiger et l’éloigne nécessairement de toute forme d’acceptation en tant que parti de gouvernement. 
Mais je lui sais gré d’avoir depuis longtemps adopté une position ostensiblement antiraciste qui la distingue définitivement de l’extrême droite. 

 [photo]



Il serait temps que Dieudonné l’accepte une fois pour toutes ; tant ses sympathies que ses convictions politiques le rattachent  exclusivement à l’extrême droite, son populisme, son obsession pour ces aberrations intellectuelles que sont le concept de race et la théorie du complot.  


Non je n’invente rien. Je n’en rajoute même pas un peu. 
Tout est dans le texte, clair et lapidaire : 
« Vous allez découvrir à quel point le peuple n’est plus dupe (…) et à quel il est conscient du rôle que jouent les réseaux sionistes »
Toujours le même refrain obsessionnel et entêtant ; celui-là  même qui sous-tend le discours négationniste tout entier ; celui de la théorie du complot et du gouvernement occulte.
La voilà la véritable base idéologique de Dieudonné celle qui fonde son discours politique, et qui ne trompe personne.
Si je n’ose croire que Dieudonné fera un score important aux élections européennes il est tout de même agaçant que l’on aborde la question de ce scrutin seulement lorsqu’un populiste fait acte de candidature ou pour relater les querelles d’égos qui agitent les principaux partis de gouvernement.
 
Quoique, c’est peut être vrai que ces élections européennes n’ont aucune importance. Après tout, seulement 60% des textes votés par le parlement Français chaque années sont des transpositions de directives communautaires
En somme, rien de très important d’un point de vue politique…
Billets, coup de gueule

Lorsque M. le Pen veut rétablir la peine de mort

Depuis qu’on vous agite le péril rouge comme nouvel épouvantail vous commenciez presque à oublier  le Front National ?
Surtout rassurez-vous, Marine le Pen n’a pas l’intention de laisser le parti qu’elle compte récupérer sombrer comme ce paquebot qui n’est déjà plus qu’un souvenir.
 
Celle qui avait tenté un temps d’arrondir l’image du Front National comme pour le rendre plus présentable semble cette fois décidé à revenir aux fondamentaux du papa avec des propos Ô combien plus haineux que ceux du pape qui défraient pourtant la chronique.

En effet, selon le nouvel obs ;
Marine Le Pen, la vice-présidente du Front national, a réclamé mercredi 18 mars, à Tourcoing (Nord) le rétablissement de la peine de mort, après l’agression dans cette ville d’un couple de retraités dans la nuit de samedi à dimanche. [source]
Cet déclaration n’est pas simplement une nouvelle illustration de la tendance qu’ont certains politiques à instrumentaliser l’émotion que suscite un fait divers pour réclamer un changement de la loi.

Elle illustre avant tout une certaine conception primaire de la justice qui n’a pas totalement disparue en France et qui apparait tout aussi bien dans la suite des propos de Marine le Pen : 
« La moindre des choses serait qu’il existe dans notre pays une perpétuité absolument réelle (…), ce qui permettrait à tout le moins, à défaut de remettre en place une peine de mort que l’Union européenne nous interdit de réhabiliter, de protéger la société de ses éléments les plus dangereux », a ajouté Marine Le Pen. [Même source]
[Notez au passage la petite pique souverainiste à l’encontre de l’Europe. Lisez l’article en entier Marine le Pen a aussi pris soin de pointer ces immigrés qui sont d’évidence responsables de tous nos maux… ]


Il y a tant d’arguments à opposer à la peine de mort  que la place me manquerait nécessairement.
Pourtant comme d’habitude (ou presque en matière pénale) Beccaria avait dit l’essentiel dès le XVIII° siècle :

«  Il me semble absurde que les lois, qui sont l’expression de la volonté publique, qui détestent et punissent l’homicide, en commettent un elles-mêmes, et, pour éloigner les citoyens de l’assassinat, ordonnent un assassinat public. Ce n’est pas le spectacle terrible mais passager de la mort d’un scélérat qui est le frein le plus fort contre les délits. » [source]

Voilà pour les arguments philosophiques. La peine de mort n’est tout d’abord qu’une forme abâtardie de la loi du talion qui n’a que peu de rapport avec l’idée de justice. Elle est ensuite inefficace ; la certitude de la sanction a toujours plus d’effet que sa sévérité.
 
Mais le principal argument que l’on peut opposer à la peine capitale c’est son caractère « définitif ».


Je ne veux pas simplement parler du risque d’erreur judiciaire.
Quelle idée de l’être humain peuvent bien avoir ces gens qui réclament la tete d’un individu ? 
De même quel est le fond de leur pensée lorsqu’ils fantasment sur l’idée d’une réclusion criminelle à perpétuité qui ne serait susceptible d’aménagement en aucune circonstance ?   
Ce qui unit  ces gens c’est l’idée d’un mal absolu, total et irrémédiable.
Ce qui les unit c’est le déni de tout droit au repentir, de tout droit au pardon. 
Pire, l’idée profondément ancrée que l’on peut réduire la vie  entière d’un homme à un seul de ses actes.


Il est légitime qu’une victime décide ou non d’accorder son pardon à la suite d’un acte dont elle a eu à souffrir.
Mais in fine le rôle de la justice pénale est toujours de juger un homme, pas simplement l’un de ses actes.
Or, croyez-moi sur parole, cela n’a strictement rien à voir.
Billets, et moi, societé

Ces expulsions qui cristallisent la crise

J’aime répéter à mes proches que j’ai la chance d’être –à l’instant- relativement protégé des effets de la crise. 
26 ans, un emploi stable, des revenus certes moyens, mais des charges raisonnables et pas le moindre crédit en cours.
Pas eu le temps et les moyens d’investir que ce soit dans l’immobilier où en bourse.
Voilà autant de raisons pour lesquelles je n’ai pas directement perdu un centime depuis l’aube de la crise. 

Pourtant, je ressens quotidiennement les effets de la crise dans ma vie professionnelle. 
Ne vous affolez pas. La réputation du cabinet d’avocats au sein duquel je travaille comme son profil de clientèle l’ont à ce jour tenu à l’écart des ennuis. 
En réalité face à la crise le volume de mon travail n’a pas réduit : il a muté. 
Alors que les clients « particuliers » se font plus rares, plus pressés, plus exigeants aussi les dossiers de saisie immobilière nous arrivent dans des proportions inédites.
Il y a de tout dans ces dossiers complexes, chrono-phages et jamais neutres d’un point de vue humain.

J’y découvre des escrocs démasqués, des spéculateurs malheureux, des gens de bonne foi pris à la gorge aussi.  
Mais le trait commun à la plupart d’entre-eux est qu’ils n’arrivent plus à régler le crédit de l’immeuble qu’ils ont acquis.

A présent que la trêve hivernale vient de s’achever, je ne peux m’empêcher de penser que la situation va encore monter d’un cran. 
Je ne suis pas le seul d’ailleurs à en juger par les réactions contradictoires que suscite la récente annonce de la ministre du logement Christine Boutin. 
La mesure semblait pourtant consensuelle et légitime :

«Un préfet ne mettra plus à exécution un jugement d’expulsion sans proposer un relogement ou un hébergement pour les locataires dans l’impossibilité de payer leur loyer», précise la ministre. Elle s’apprête à le clamer haut et fort aux préfets ce jeudi, lors d’un déplacement à Châlons-en-Champagne. Selon le ministère, la mesure vaut aussi bien pour les locataires dits de «bonne foi» que de «mauvaise foi», ceux qui ont les moyens de payer leur logement mais ne le font pas. [source]

Libérer les locaux pas le biais d’une expulsion lorsque les loyers ne sont pas réglés : bien sûr. Mais rien ne peut justifier de mettre en connaissance de cause un individu à la rue. C’est tout simplement inacceptable humainement. A l’heure du droit au logement opposable (et bien que cette mesure soit très insatisfaisante) il n’est pas illégitime d’en tirer les conséquences et de prévenir les contentieux en amont en imposant une obligation de reloger le locataire. 



Mais s’il est un domaine au sein duquel se cristallisent les effets de la crise c’est bien le logement. De sorte que déjà les critiques fusent.
D’un coté ceux qu’on attendait ; ces associations à qui on ne la fait plus, qui rencontrent chaque jour des locataires dont la situation était déjà précaire avant la crise et qui n’arrivent plus à garder la tête hors de l’eau.
Ceux-là sont résolument convaincus que les moyens n’y seront pas, et particulièrement agacés par ce nouvel effet d’annonce.
De l’autre des propriétaires qui ont acheté au plus haut, emprunté  en conséquence et peinent à recouvrer les loyers qui leurs sont nécessaires pour ne pas sombrer eux-même sous le poids de leur dette. 
C’est avec une véritable fureur qu’ils accueillent cette mesure qui leur apparait  à la fois comme un déni de leurs problèmes et une prime aux tricheurs.

Ils sont nombreux, si l’on se fie aux commentaires suscités par l’annonce de Christine Boutin dans l’article du Figaro qui y fait référence. 

Morceaux choisis et non « retouchés » : 

  • Bravo, plus d’expulsion pour ceux qui ne payent pas les loyers et ensuite plus de propriétaires qui mettent leur bien en location, s’ils n’ont pas de quoi reloger. Vous aurez bonne mine Mme. De plus vous encourgez les locataires à ne pas payer leur loyer. (jean)
  • Enfin une EXCELLENTE mesure, je sais maintenant que si je paie plus mon loyer je ne pourrais plus être expulsé, alors ça s’arrose je vais au Shopi du coin pour acheter de la gnôle et arroser ça, mon proprio se fera indemniser par l’assistante sociale du quartier. (Victor) 
  • comment peut elle dire une chose pareille, Nous sommes propriétaire privé d’un logement que nous louons depuis 2005 à des gens sans scrupule. Tous les mois, nous devions allez les voir pour se faire régler le loyer mais depuis +d’ 1 an, ils ne payent plus rien. comprenez  » ils sont malades !!! » nous dit-elle. Tout le monde sait que qd on est malade on n’a plus besoin de payer son loyer !!!! Bref Que devons nous faire face à des gens aussi mal honnetes, qui manipule les autres. Même les politiques les défendent. le loyer est de 470 euros. Devons nous tous faire du social !! (chris)


Notez que leur grogne n’est pas raisonnablement défendable. L’idée de Christine Boutin n’étant pas à terme d’empêcher les expulsions mais de bien de reloger tout le monde.

Mais un sentiment n’a pas à être raisonnable.

Pour consternants que soient ces commentaires ils traduisent une détresse réelle.
Celle d’ex-classes moyennes qui se sentent pousser peu à peu dans les rangs des précaires et désignent de supposés fainéants qui seraient la cause principale de leurs maux. 
Car une fois de plus lorsque les choses vont mal, le bouc émissaire est plus qu’un principe d’explication : il est une cause patente…