La magie est un spectacle vivant. Comme le théâtre, elle perd beaucoup lorsqu’elle est filmée.

Pourtant, je ressens une vrai enthousiasme en ce moment à la jonction entre ces deux disciplines.

Je pense par exemple à insaisissables, film de braquage qui met en scène des magiciens et dont la bande annonce, pour alléchante qu’elle soit ne promet pas un film dans lequel les magiciens vont largement se reconnaître.

A l’autre bout du spectre, les frères Buck  viennent de financer via Kickstarter Our Magic un documentaire très prometteur, fait par des magiciens, mais qui a peu de chances de déplacer les foules.

Desperate Acts of Magic.

Joe Gold tente en ce moment de trouver la voie médiane avec Desperate Acts of Magic, un petit film indépendant qui vient de sortir dans quelques salles aux Etats-Unis.

Cautionné par de nombreuses têtes bien connues des magiciens, [Shin Lim à 0:24 ! ] le film, dont je n’ai vu pour l’heure que la bande-annonce a l’air drôle, accessible et rempli de petites anecdotes dans lesquelles les magiciens amateurs ou professionnels se reconnaîtront. [Ah ! Le bonheur de jouer devant le regard défiant d’un gamin qui ne s’étonne de rien… ]

Mieux, le film semble focaliser une grande partie de son scénario sur le rapport compliqué entre la magie et les femmes, le plus souvent relégués au rang « d’assistante » même lorsque leur rôle sur scène demande une véritable technique de magicien.

La présence (ou plutôt la relative absence) des femmes dans le milieu de la magie est une vraie question, que je n’avais pas vraiment vu poser ailleurs.

Alors, si vous voulez bien on va en parler un petit peu.

Le cadre

Je ne vais pas vous refaire ici l’article de @Mar_Lard sur le sexisme en milieu geek qui a d’ores et déjà fait trois fois le tour du web et s’applique très largement à l’univers magique, qui par bien des aspect peut se rattacher au milieu « geek ».

Par ailleurs, j’écarte dès à présent ces forums de « drague » qui proposent de séduire par la magie. Tout d’abord parce que ce ne sont pas à proprement parler des magiciens qui s’y expriment. Et surtout parce qu’ils énoncent des évidences. On est toujours plus séduisant lorsqu’on fait une chose qu’on aime et pour laquelle on est doué.

(Choisissez quand même bien l’activité. La taxidermie par exemple a des chances de plaire, mais à des catégories très ciblées).

Dernière chose : je suis un homme et à ce titre pas qualifié pour parler au nom des femmes dans la magie.

Enfin, cet article qui n’a pas de prétention à la Vérité  ne reflète que mon expérience et mon envie de voir le milieu magique devenir un peu moins « consanguin » ce qui ne pourra que l’aider à faire rêver le plus grand nombre.

Les femmes aiment la magie ?

Je pratique la magie dans des trains, des restaurants, dans la rue. Un peu partout.

Et ce que je peux vous dire, c’est que la plupart des gens aiment la magie, le plus souvent sans vraiment le savoir.
Soyons honnêtes, la plupart des gens n’ont vu que de la très mauvaise magie. L’ignoble tour de carte du vieil oncle qu’on ne voir qu’à noël, après qu’il ait entamé la troisième bouteille de vin. Voire le tour de la malle indienne dont tous les cirques ont un exemplaire depuis un siècle.

Lorsqu’on leur présente des choses, même simples qu’ils n’ont jamais vu, la plupart des gens sont émerveillés. Mieux, ils ont vraiment envie de ressentir ce genre de choses.

Alors forcément, il y ceux qui ont envie d’apprendre. Pas simplement ceux qui vous supplient de « révéler un truc ». Non il y a aussi ceux qui ont vraiment envie d’apprendre et dont on se dit qu’ils vont vraiment s’y mettre et essayer de se documenter une fois rentrés chez eux.

Et ce que je peux vous dire c’est que la proportion de filles qui ont ce genre de réaction est selon ma propre expérience au moins équivalente à la proportion de garçons.

Si je perçois une envie, je devrais donc croiser pas mal de magiciennes.

Pourtant, sur les forums de magie, il n’y a que des hommes ou presque. Dans les conférences, presque pas de femmes.

Et dans le milieu professionnel… Rien, ou pas grand chose.

Pas les bienvenues ?

Juste pour rire j’ai fait un tour sur des sites spécialisés en écrivant cet article.

Vérification faite, les sites que je fréquente habituellement et qui vendent des « fringues de magicien » ne proposent  que des tee shirts pour homme. (ici ou là par exemple)

Je ne m’en étais pas rendu compte jusqu’à aujourd’hui et la bande annonce de Desperate Acts of Magic. Probablement parce que je suis précisément dans la cible de ces sites.

Ce que je savais déjà par contre, c’est qu’il n’y a presque pas de femmes sur les sites spécialisés. Ou alors dans le rôle de la jolie blonde  drôle et enthousiaste mais qui ne pratique pas.

Et puisque l’usage d’assistantes est devenue désuet, les femmes sont le plus souvent reléguées au rang de spectatrice en courte tenue.

Jusqu’à tourner des vidéos parfaitement ridicules.

Sérieusement ?

Le « Manhattan opener » présenté dans cette vidéo est un beau tour. Est-ce la peine de filmer le décolleté d’une jeune fille qui ne porterait probablement jamais cette robe dans la rue durant trois minutes pour me le vendre ?

Pour qui me prend on ?

 Ne vous méprenez pas. Il y a des femmes magiciennes. Mais il leur faut par exemple se construire un personnage à la hauteur des attentes du milieu.

Ekaterina Dobrokhotova, qui vient du Canada, fait une belle carrière internationale. Elle a incontestablement un style très personnel ( il y a plein de belles choses sur sa chaîne youtube !) et beaucoup de talent. 

Mais lorsqu’il s’agit de s’adresser aux magiciens, on la trouve de plus en plus court vêtue…

Comme si miser sur une image très sexualisée était le seul moyen de se faire un nom.

J’aimerais avoir une conclusion définitive sur le sujet.
Mais ce n’est pas pour aujourd’hui.

Mais j’ai envie de dire aux jeunes magiciennes : venez.
Vous êtes les bienvenues.

Et pendant que j’y suis, j’ai vraiment envie de voir Desperate Acts of Magic, en français, dans un cinéma…

Si un distributeur prenait le temps d’y jeter un œil, il ferait au moins un heureux 😉