Le Bilan

Bilan #3 : Hauts en couleur

Chaque semaine je tente un petit « bilan » des choses qui ont attiré mon attention.

 

  • Verbe haut en couleur

Cette semaine, je me suis beaucoup intéressé aux récentes mésaventures de Bernard Ripert.

Bernard Ripert a 65 ans, il est Avocat au barreau de Grenaoble, il a la passion de la défense et le verbe haut. Mais le moins que l’on puisse dire, c’est que ça lui joue des tours.

Déjà, le 2 décembre 2013, la cour d’appel de Grenoble lui avait interdit d’exercer pour une durée d’une année à la suite de propos tenus lors d’une audience. A l’époque, une pétition avait été lancée pour contester le caractère excessif de cette sanction.

Plusieurs fois visé par des procédures disciplinaires pour ses propos, n’en est pas moins un pénaliste respecté.

Le 23 Mai 2016 il est placé en garde à vue pour «des faits de « menaces ou actes d’intimidation commis envers un magistrat en vue d’influencer son comportement dans l’exercice de ses fonctions » qui remontent au 13 mai dernier.

Les faits qui lui sont reprochés ?

Vendredi 13 mai, Bernard Ripert se rend au palais de justice de Grenoble. Il vient déposer un pourvoi contre l’arrêt de la cour d’appel prolongeant la mesure de suspension dont il fait l’objet. Il passe devant le bureau d’un conseiller qui a siégé dans l’affaire le concernant. La porte est ouverte. « Là, il a eu une attitude menaçante, selon le conseiller et un témoin », indique le procureur de Grenoble, Jean-Yves Coquillat. « Il l’a regardé fixement ». Pas un mot n’a été échangé. Puis, au greffe, l’avocat aurait tenu des propos menaçants à une greffière, selon le procureur. Celle-ci « n’est pas capable de se souvenir des propos tenus », souligne le chef du parquet. [via Dalloz.fr – paywall]

Interpellé au matin à son domicile, menotté, il est ensuite placé en garde à vue, puis à l’hôpital Michalon pour « tension élevée », Là, il fait l’objet d’une expertise psychiatrique, demandée par le parquet. Quelques heures plus tard, il est interné en hôpital psychiatrique.

Le préfet de Savoie a signé mercredi soir la levée de son hospitalisation sous contrainte, mais les ennuis ne s’arrêtent pas pour Maître Ripert,

Récemment relaxé par le conseil de discipline pour un supposé « manquement à la déontologie » Me Ripert doit comparaître le 2 juin 2016 devant cour d’appel de Grenoble à raison d’un appel interjeté par le Parquet.

Je ne vous cache pas que j’ai suivi avec passion cette histoire. On peut y voir une réponse de la machine judiciaire à un comportement excessif ou une volonté de réprimer fermement un défenseur insoumis.
Or je crois que l’insoumission est un devoir de la défense. Et cette histoire, où l’on enferme un homme pour un simple regard ressemble furieusement à une tentative de pousser vers la sortie un Avocat qui « parle trop fort ».

 

  • Go-fast

Vous avez probablement découvert comme moi les révélations  stupéfiantes de Libération au sujet de l’ancien patron de la lutte antidrogue, François Thierry :

soupçonné d’avoir laissé entrer en France plusieurs dizaines de tonnes de cannabis au cours des dernières années, avec la complicité d’un des plus gros trafiquants européens, recruté par ses soins.

Dans l’article, il y a un passage en particulier, auquel j’ai repensé toute la semaine :

Selon ce témoin, jugé crédible par le parquet, le schéma était parfaitement rodé. La drogue était achetée en gros à Marbella. Une partie des équipes, préalablement identifiées par l’Ocrtis, était ensuite interceptée dans des «go-fast» à la remontée. Les autres pouvaient alors inonder le marché sans être inquiétées. La came étant payée au départ, rien n’était perdu. Une stratégie basée sur un double objectif : faire grossir la taupe de François Thierry tout en éliminant les équipes concurrentes, grosses saisies et convocation de la presse à l’appui.

C’est que, des Go-fast, dans le coin où je travaille, on en voit passer quelques uns.

Il y a plusieurs mois, j’avais eu l’occasion de discuter, dans un cadre tout à fait privé avec un magistrat passablement insatisfait des conditions dans lesquelles il venait de juger  en comparution immédiate un couple avec enfant, arrêté avec des stupéfiants. Parce qu’en comparution immédiate, on dispose d’une enquête tout à fait sommaire à l’occasion de laquelle aucune vérification n’a été faite pour confirmer les propos des prévenus. Le couple avait été condamné, envoyé en détention, et l’enfant placé.

J’ignore tout de l’histoire de cette famille et de ce qui a pu lui arriver depuis. Mais quand je lis que certains go-fast ont pu être lâchés sur la route sans aucune chance d’arriver au bout de leur voyage, je pense à elle.

  • Turner et la couleur

Cette semaine, j’ai fait la route pour aller voir l’exposition « Turner et la couleur » que l’on peut admirer jusqu’au 18 septembre à l’Hotel de Caumont (Aix en Provence). J’ai une vraie passion pour la peinture de Turner. L’art, c’est un truc qui peut vous laisser indifférent à un moment, puis se mettre à vous filer des frissons sans prévenir. La plupart des gens ont déjà ressenti cela avec de la musique. Vous écoutez un morceau et d’un coup vous comprenez ce que la musique peut avoir de magique. En ce qui me concerne, c’est Turner qui m’a fait comprendre pour la première fois l’émotion qu’on pouvait expérimenter devant un tableau.

Sans surprise je suis arrivé à l’exposition très enthousiaste et je suis reparti conquis.

Mon seul reproche concerne le lieu. L’hôtel de Caumont est une maison magnifique, mais le lieu m’a paru dépassé par son succès. La foule, dense m’a un peu gêné. (Mais au fond c’est parce que je suis un ours).

Allez-y, ce serait dommage de passer à coté de tous ces tableaux réunis.

  • Liens en vrac

Peu de liens cette semaine, durant laquelle quelques jours de vacances m’ont un peu éloigné du web…

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