Billets, coup de gueule, politique

Detecter la bétise à n’importe quel age

Ils ont quelque chose de merveilleux ces propos de Frédéric Lefevre tenus hier matin sur Europe 1 et repris aujourd’hui dans toute la presse 20 minutes en tête :
«En 1945, un mineur sur 166 était mis en cause dans une affaire pénale, aujourd’hui c’est un sur trente, il faut réagir», a déclaré Frédéric Lefebvre sur Europe 1. «Je ne pense pas» que ce soit trop tôt, a-t-il dit à propos de la proposition de fixer la responsabilité pénale à 12 ans faite par la commission Varinard chargée de réformer la justice pénale des mineurs
«Moi, je souhaite qu’on aille même sans doute un peu plus loin», sur «la question de la détection précoce des comportements», a-t-il ajouté. «Cela a été dans beaucoup de rapports. On dit qu’il faut le faire dès l’âge de trois ans pour être efficace», a-t-il relevé.
Oui ces propos ont quelque chose de merveilleux en ce qu’ils révèlent du personnage Frédéric Lefevre et ceux pour le compte duquel il agit. 
Fréderic lefevre, pour ceux qui auraient réussi à l’ignorer,  est député des hauts de seine, Lobbyiste par le biais d’un cabinet spécialisé dnoommé « Pic Conseil« . 
Frédéric Lefèvre c’est aussi ce porte parole de l’UMP devenu célèbre pour ses saillies violentes
Merveilleux car pour l’ensemble de ces raisons ces propos engagent leur auteur pour être insusceptibles de se voir qualifier de dérapage. 

Ce qu’il y a d’intéressant à mon sens dans cette volonté de détecter les enfants violents dès le plus jeune age c’est l’empreinte du déterminisme le plus marqué et le plus bête qui soit. 
L’idée que dès le stade infantile l’enfant serait marqué du sceau d’un fatum  à même de déterminer l’ensemble de  ses actes est évidemment absurde. 
Pourtant, à bien y regarder l’idée de ce déterminisme est au cœur de notre politique actuelle. Elle est en réalité la seule justification intellectuelle possible à certaines  des mesures emblématiques prises par notre exécutif. 

Comment comprendre autrement cette rétention de sureté dont la finalité est d’enfermer des individus à raison d’actes qu’ils risquent de commettre ?
Comment comprendre autrement cette volonté de frapper au plus tôt au sens pénal du terme ?

L’idée que nos dirigeants puissent avoir la conviction d’un déterminisme présent dès la naissance a quelque chose de terrifiant.
Pourtant cette idée n’est pas nouvelle. Déja Miuchel Onfray l’évoquait longuement dans un article paru dans le Nouvel Obs du  26.04.2007, et qui n’était autre que le compte rendu de ses entretiens avec Nicolas Sarkozy. 

Dans cet article (que je vous invite à lire en entier) Onfray écrivait les mots suivants :

Je crois comprendre qu’il pense que le mal existe comme une entité séparée, claire, métaphysique, objectivable, à la manière d’une tumeur, sans aucune relation avec le social, la société, la politique, les conditions historiques. Je le questionne pour vérifier mon intuition : de fait, il pense que nous naissons bons ou mauvais et que, quoi qu’il arrive, quoi qu’on fasse, tout est déjà réglé par la nature.

Voila, c’est dit. Tout est réglé par la nature. 
Voila c’est dit, la culture n’est rien, l’acquis n’es rien, pas plus que l’expérience.
Quoi d’étonnant dans ces conditions que les mêmes veuillent à présent mettre au placard les vieux tests de culture générale ?
  
J’ai peut être une idée pour les remplacer. Puisque tout est déjà fait à cet age, pourquoi pas des tests pour détecter les imbéciles dès trois ans ?
 Quelque chose me dit que ca pourrait être amusant…
à vif, Billets

L’arbitraire et la solitude

Ça se passe hier en fin d ‘après midi.
 
Je suis passager dans une voiture qu’un motard arrête en bord de route. 
Ma compagne est au volant, nerveuse, comme toujours dans ce genre de situation.
Quant à moi, je suis à l’inverse on ne peut plus calme. 
J’ai l’habitude des gendarmes, avec qui je n’ai jamais eu que d’excellents rapports.
C’est donc avec un sourire pas totalement forcé que je lui dis bonjour. 
Il nous fait signe de baisser la vitre, de couper le moteur, froid autoritaire ; professionnel.
Il fait le tour du véhicule, puis une seconde fois. Il inspecte, baisse la tête puis se retourne, minutieux. 
Il pose une brève question au sujet de l’attestation d’assurance qui, non, n’a pas été changée, mais oui se trouve dans la voiture. 
L’oubli est bien vite réparé. 
Il s’éloigne à nouveau lorsque son équipier arrête un second véhicule puius fait de nouveau le tour de véhicule. 
Je l’interroge lorsqu’il passe à ma hauteur, alerté par sa particulière attention à la carrosserie de la voiture qui n’est certes pas très jeune. 
Il m’intime l’ordre de me taire et achève son manège avant de revenir à la hauteur de la conductrice. 

Il lui demande si elle sait pour quelle raison il cru devoir l’arrêter. 

Sincère, elle répond par la négative.
Lui refait un tour lentement puis revient à la vitre.
 
Il prétend qu’elle se serait abstenue de s’arrêter au panneau stop situé quelques cent cinquante mètres plus loin, derrière les arbres en fait. 
Seulement voila ce panneau n’est pas un « stop », mais un « cédez le passage » pour lequel elle a marqué un temps d’arrêt bref, mais bien réel.

 [source]

Vérification faite ce matin elle avait absolument raison quant à la nature du panneau.

Mais peu importe dès lors que l’adjudant conteste, opiniâtré que nous ayons effectué un arrêt, aussi bref fut il.

Je lui dis donc que nous sommes désolés et crois bon de le saluer de nouveau lorsqu’il fait mine de s’éloigner pour de bon. 

Il revient le sourcil froncé et s’estime en droit de remettre en question mon éducation sur un ton qui n’a rien de respectueux.
Il demande alors à ma compagne de le suivre.
 
Elle reviendra cinq longues minutes plus tard, en larmes et délestée d’un chèque de quatre vingt dix euros pour prix d’une infraction imaginaire. 
Quant à moi je m’en tire avec une remontrance et la menace d’un procès-verbal pour l’outrage que ma politesse semble constituer à ses yeux.
 
Cette mésaventure est bien loin de celle qu’à récemment vécue Vittorio de Fillipis l’ex PDG et directeur de la publication de libération :
« violemment interpellé, vendredi à l’aube à son domicile. Il a ensuite été enfermé et déshabillé à deux reprises avant d’être conduit devant la juge Muriel Josié, qui l’a mis en examen pour « diffamation publique » [source]
Pourtant ma petite histoire et celle bien plus grave et violente  qu’à subie Monsieur De Fillipis ont ceci en commun qu’elles illustrent l’attitude d’un minorité des représentants de l’ordre qui probablement galvanisés par la culture du résultat à laquelle on leur a demandé de se soumettre.
 
Il parait que l’arbitraire c’est « l’application de la subjectivité d’une personne détenant une parcelle de pouvoir aux dépens d’une autre qui en est démunie. C’est le pouvoir autoritaire dans son application ».

J’ai tendance à craindre au moment où j’écris ces lignes qu’il ne faille à bref délai ajouter un caractère quotidien à cette définition.
Billets, politique

[billet à troll] Le malentendu socialiste

C’est probablement cette petite phrase de Jean Christophe Cambadélis reprise ce matin par le Parisien qui résume le le mieux la situation du PS.

« Il y avait deux conceptions de la rénovation. L’une, celle de Royal, visait à faire quelque chose de totalement nouveau, l’autre, celle d’Aubry, espérait un renouveau gardant ce qui est la nature même du PS. Cette dernière l’a emporté. »[source]

Voila c’est dit. Il y a bien deux conception du PS et l’une l’a emporté, enfin pour l’instant. Car la seconde est bien plus que vivace pour représenter sensiblement la moitié du PS.
Cette situation intenable semble partie pour durer aussi longtemps que ce parti persistera à ne pas vouloir sortir du brouillard quant à son projet politique.

L’élection de Ségolène Royal au poste de premier secrétaire, pour agaçante qu’elle puisse sembler à beaucoup, aurait eu ceci de salutaire qu’elle aurait justement permis de lever cette ambiguïté qui fonde à la fois l’identité du PS et et l’empêche depuis quelques années de proposer un vrai projet politique. 

Par l’élection d’Aubry le PS persiste en effet à vouloir construire son modèle de reconquête du pouvoir sur le mécanisme d’union de la gauche qui avait été bâti en son  temps par François Miterrand.
Cette union était motivée par la volonté du PCF de devenir un veritable parti de gouvernement capable par cette union d’insuffler une politique plus sociale par un fort interventionnisme économique.
Or ce mécanisme a été rendu obsolète dès avant la fin du second mandat de François Miterrand, et avec le concours de celui-ci.
En organisant le référundum sur le traité de Maastricht puis la ratification de celui-ci la France a fait le choix, il est vrai pas totalement conscient de renoncer à l’interventionnisme économique qui fondait l’Etat Providence afin de permettre la construction du marché unique dont l’essence profonde est le libéralisme économique
[une image inspirée de Florent Guerlain trouvée grâce à l’excellent Geoffrey Dorne ]

C’est la question européenne qui divise irrémédiablement le parti socialiste et ce mythe de la possibilité d’un autre Europe plus sociale (ce plan B évoqué lors du dernier référendum) n’est qu’un leurre longtemps entretenu à des fins politicienne par ceux qui l’ont brandi. 

 

Cette attitude est d’autant plus déplorable que l’Europe est une force qui nous apporte bien plus que l’on ne le suppose trop souvent.
C’est dans le cadre des question économiques et européennes désormais irrémédiablement liées qu’il appartient au parti socialiste de faire son choix. 

Choisit t’il de déporter son centre de gravité vers le centre en optant pour la voie du social libéralisme ? Cette solution aurait l’avantage de lui permettre de proposer un projet applicable très rapidement. 

Préfère t’il revenir à une politique plus interventionniste et en cela plus à gauche ? Ce choix ambitieux et risqué suppose alors que le PS accepte  (et avoue à ses electeurs) que ce combat là ne se joue plus vraiment à l’échelle nationale.

A défaut de se positionner dans ce débat d’autres lui raviront la place. 

Déjà Besancenot, probablement rallié par Mélanchon dessine les contours de ce qui pourrait devenir à brève ou moyenne échéance un véritable parti d’extrême gauche ayant vocation à gouverner. 

Quant au centre gauche les valeurs humanistes de Bayrou ont prouvé lors de la dernière présidentielle qu’elles étaient capables de séduire bien des décus du brouillard socialiste. 

Quel que soit le choix du PS il vaudra mieux que la situation actuelle. 

Outre que son image est désormais plutôt esquintée ce parti  doit comprendre que la grogne actuelle envers la politique de Nicolas Sarkozy ne saurait suffire à faire voter les francais en masse vers une formation politique qui est incapable de lui proposer un projet de société cohérent. 

Persister dans cette voie serait d’autant plus dommage que l’UMP souffre également d’une grave contradiction  : coincé entre une politique libérale au niveau économique mais (très) conservatrice du point de vue des valeurs Une contradiction qui, bien exploitée, pourrait faire des ravages dans les urnes.