Points de jonction (31)
Dès le troisième matin qui a suivi ma dernière rencontre avec Maximilien Huet de Francart, je me suis rendu aux archives de différentes bibliothèques, et j’ai commencé à rassembler différentes informations, principalement des coupures de presse, sur la vie de Giacomo Sarpetti. Comme je l’avais affirmé à l’ancien avocat, j’ai toujours considéré le roman comme la forme la plus aboutie de littérature. C’est donc à la manière d’un roman que j’ai construit ma narration. Le plan était en fait assez simple. Sur un ton poétique, j’ai mis au point un récit qui mêle soigneusement une biographie de Giacomo, ainsi qu’une vision romancée de certains passages des derniers mois de ma vie. Le narrateur est fortement inspiré de Maximilien Huet de Francart, mais se distingue cependant. Pour être honnête, je voulais apporter ma vision et mes émotions personnelles à la narration, et j’ai donc choisi de faire raconter l’histoire par un personnage à mi-chemin entre moi et mon ancien employeur. Ce procédé me permettait de montrer d’une manière élégante comment cette histoire avait fait irruption dans ma vie, dans mon histoire.
J’ai appelé ce roman Giacomo, simplement, et je dois avouer que c’est certainement ce que j’ai écrit de mieux.
Poitns de jonction (30)
Je n’ai jamais revu Maximilien Huet de Francart.
Le lendemain, lorsque je me suis assis à ma table habituelle, j’ai allumé mon ordinateur et tenté de remettre de l’ordre dans mes idées. Il fallait que je sorte l’histoire de Nicolas de l’impasse dans laquelle je l’avais entraînée. J’avais besoin du salaire que me versait Maximilien Huet de Francart, et je tenais à le mériter. Mais plus que tout, J’avais terriblement besoin d’arriver à achever ce livre, pour encore un peu me sentir écrivain à part entière, plus important encore ; pour me sentir pleinement moi à nouveau.
Je suis resté à attendre la journée entière, mais personne n’est venu me rejoindre. Une part de mon contrat consistait à ne pas écrire une ligne sans mon employeur. J’ai donc passé la journée à rêver, à boire, et à laisser mon roman errer d’impasse en impasse.
J’ai passé deux jours ainsi à ne rien faire, puis je me suis remis au travail. Je n’avais qu’une option réellement sérieuse, une option si évidente que plus ou moins consciemment j’avais tout fait pour ne pas penser à elle.