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Moraliser l’économie ?

L’actualité est souvent un affaire de parallèles, de contre-pieds. 
Dans le climat de panique globale deux événements « collatéraux » survenus ces jours-ci semblent s’opposer d’une manière presque…  amusante. 

D’un coté Warren Buffet, le milliardaire que l’on ne présente plus a entamé une partie de Monopoly grandeur nature qui défraie la chronique; « En deux semaines de crise, il a investi pas loin de 15 milliards de dollars dans diverses sociétés plus ou moins en difficulté »  et se serait par ailleurs engagé à contribuer au plan de sauvetage « Paulson » à hauteur de 7 milliards d’euros. [source] [voir aussi]

Plus près de nous la présidente du Medef annonçait la création d’un code élaboré conjointement avec l’association française des entreprises privées (AFEP) destiné à moraliser l’économie. ce qui lui faisait déclarer ce matin :
« La France va disposer en matière de gouvernance d’entreprise du code le plus éthique qu’on puisse trouver aujourd’hui dans le monde occidental”
Cet accord –certes élaboré sous la menace présidentielle de légiférer « avant la fin de l’année » faute de propositions satisfaisantes– intervient à un moment suffisamment symbolique pour qu’on lui prête de l’importance. 
S’il ne remet pas fondamentalement en cause les très critiqués « parachute dorés », il vise principalement à les empêcher de s’ouvrir à l’intention des dirigeants de sociétés en difficulté. [source]

Mises en perspective ces deux attitudes ont de quoi étonner. 
Là où le MEDEF opte pour une attitude résolument humble, frappe sa coulpe et promet de changer, Warren Buffet adopte un comportement inverse et saisit au vol une occasion d’accroître encore son immense fortune, et consolide de l’autre main (par un soutien à l’économie que l’on ne peut imaginer être désintéressé) les actifs fraîchement acquis .  
Un financier américain et une institution francaise… J’ai pensé un instant que l’exemple inverse n’aurait pu se produire avant que l’aventure de la BNP qui vient de voler au secours de Fortis ne chasse mon préjugé.   
Il est une chose dont je reste néanmoins persuadé, c’est que voila deux manières d’aborder l’économie qui illustrent particulièrement bien des visions idéologiques fondamentalement opposées. 
Bien difficile, en effet de supporter une économie immorale, celle qui broie des destins sans la moindre considération pour ces individus qui se trouvent nécessairement derrières les chiffres. 
Il est humain dans ces conditions de réclamer à toute force une « moralisation » de l’économie.

Il est tentant aussi de s’indigner de la rapacité que témoin Warren Buffet en ces circonstances ; profitant de l’occasion pour prendre entre autres et à moindre coût cette participation dans le capital de General Electric qu’il projette depuis de nombreux mois. 


A bien y regarder cependant ces deux exemples se rejoignent dans une morale purement économique.
Ne pas supprimer les « golden parachute » mais les soumettre à une obligation de résultat. 
Permettre une attitude de rapace lorsqu’elle est avant tout un pari sur l’avenir. 
Dans ces deux exemples c’est la notion de risque qui se distingue.  
Parce qu’en économie l’immoralité réside souvent dans l’absence de risque.

Mais même cela au fond n’a pas tant d’importance… 
Car on sait bien que les milieux financiers se soucient plus volontiers d’efficacité que de morale.
Or de ce point de vue, je serais tenté de miser bien mieux sur les résultats de Warren Buffet que sur les effets des déclarations d’intention du patronat Francais.  


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