Je suis en train d’achever l’écriture de cette histoire, et étrangement, tous les événements de ces derniers jours semblent aspirer à ce qu’elle se conclue.
Les chèques de Giacomo ont continué à arriver jusqu’à la parution du livre. Lorsque enfin, grâce à son succès, je n’ai plus eu besoin d’eux, j’ai cessé de les trouver dans ma boite tout simplement.
Trois semaines après la sortie du livre, j’ai reçu un faire-part qui m’annonçait le décès de Maximilien Huet de Francart. Si le livre s’achève, comme il me l’a demandé à la mort de Giacomo, quelques semaines après sa sortie de prison, je sais aujourd’hui que sa deuxième vie a été particulièrement riche. Giacomo Sarpetti a adopté de nombreuses identités après sa sortie de prison. Maximilien Huet de Francart fut effectivement son nom au cours des derniers mois de sa vie, mais j’ai également découvert qu’il a notamment vécu sous le nom de Jacques Dumas, ou de Tiburce Claudel. Cette liste est forcément partielle. J’ai passé les derniers mois à faire des recherches afin de comprendre la vie de Giacomo. J’ai dû à force me résigner à accepter que subsistent des zones d’ombres dans cette vie. Giacomo l’a voulu ainsi, et je dois l’accepter. Je peux cependant vous révéler que Giacomo a principalement résidé à New York tout d’abord, puis à Paris au cours de ces années. Il a durant cette période fondé différentes sociétés principalement aux états unis, mais ne semble pas cette fois-ci qu’il les ait gérées personnellement. Miraculeusement, la prison semble avoir laissé son talent intact. L’essentiel de sa fortune a visiblement été également préservé. Son argent, placé sans divers paradis fiscaux a permis à sa mère de finir ses jours dans le confort qu’il s’était promis pour elle. Marcelle Sarpetti est décédée en 1999, à l’age de 81 ans dans une luxueuse maison sur la petite île de Gozo ; au large des cotes maltaise. Bien sûr, jamais elle n’accepta la condamnation de son fils. Cette épreuve la toucha durement et il semble que sa santé en fut gravement affectée. Elle eut cependant la force d’attendre la sortie de prison de son fils, puis de passer ses dernières années avec lui avant de finalement s’en aller.
Après avoir reçu le faire part, J’ai beaucoup hésité avant de me rendre aux obsèques de Giacomo. J’ai finalement décidé d’y assister en compagnie de Sophie. A cette occasion, j’ai fait la connaissance d’une petite Elise, âgée de huit ans, et qu’il semble avoir élevé comme sa fille. Je n’en sais que très peu sur elle, mais sa présence est pour moi un indice réconfortant, un signe qui me permet d’espérer que les dernières années de la vie de Giacomo ont été belles et heureuses. Je me devais de rendre un dernier hommage à cet homme qui m’a dans le même temps trompé d’une manière que je n’aurais pas cru possible, et fait cadeau de son histoire pour en faire un livre magnifique.
Quant à moi, je suis incroyablement heureux.
Après le livre, c’est l’enfant qui à paru hier.
C’est un garçon. Il s’appelle Nicolas…
Un point reste en suspens, je sais. J’ai commencé une histoire, et je ne l‘ai pas vraiment terminée.
Maximilien Huet de Francart m’a déclaré lors de notre dernière rencontre que si je n’arrivais pas à la conclure de manière satisfaisante, c’était parce que le moment n’était pas encore le bon. Je crois aujourd’hui qu’il n’avait que partiellement raison.
Le moment n’était pas le bon, c’est certain. Mais je crois maintenant que ce n’état pas à moi d’écrire cette histoire. J’ai joint à ce récit les quelques pages qui forment le début de l’histoire de Nicolas car je les crois indispensables à sa compréhension. Sans elles, les quelques mois qui viennent de se dérouler n’auraient pas existé… du moins pas de la manière dont ils ont existé. Cette histoire est certes inachevée, mais elle a eu au moins autant d’influence sur ma vie que j’ai pu en avoir sur sa création… C’est un fait cependant ; déjà, elle ne m’appartient plus.
J’ai mis en scène un petit Nicolas, un petit garçon qui s’éveille au monde, qui ne sait presque rien et qui est curieux de tout. C’est à lui de conclure cette histoire, et je ne peux le faire à sa place. Je tiendrais sa main si nécessaire, mais c’est lui seul qui tient la plume.