Billets, coup de gueule

Oui Dieudonné le débat est ouvert…

Aujourd’hui j’ai décidé d’être sympa avec vous. Oui, je vais vous épargner LA vidéo des exploits de Dieudonné qui fait la une de toute la presse
Parce qu’entre  deux bouts de foie gras et quelques verres de Banyuls vous les avez nécessairement aperçues ici ou là.

Et puis parce que ce qui compte avant tout ce ne sont pas ces images c’est le fond. 
Dieudonné lui-même affirme d’ailleurs vouloir lancer le débat… 

Je me propose de lui en offrir un, et je vais être un peu long, juste de sorte qu’il ne puisse être dit qu’il ait été lynché médiatiquement sans analyse préalable. 
 

1- De l’artiste au militant
L’homme a une belle plume et un talent comique incontestable.
Mais il n’est guère besoin de réfléchir bien longtemps pour trouver des exemples d’artistes de génie à la pensée indéfendable
S’il n’était que sa pensée d’ailleurs la chose n’aurait probablement pas une telle ampleur.  
On peut apprécier le travail d’un artiste sans toutefois épouser ses idées. 
Prenez Brigitte Bardot par exemple. On doit nécessairement peut ne pas être d’accord avec certaines de ses prises de position clairement d’extrême droite mais cela n’abolit pas la qualité des films qui ont été les siens en tant qu’actrice. 
Non, ce qui est intéressant chez Dieudonné c’est ce perpétuel mélange des genres qu’il entretient, mieux, cette mise en scène. 
Dans son spectacle du 26 décembre Dieudonné a une fois de plus clairement aboli la frontière entre son rôle d’artiste et sa volonté de militant. 

Je pense et je pose chacune des lettres du mot militant.

Car en invitant Faurisson sur la scène du Zénith Dieudonné a fait bien plus que se poser en défenseur d’une liberté d’expression qu’il aurait pu défendre de bien d’autres manières, dans un tout autre contexte et à bien meilleur escient.

Non Dieudonné s’est clairement offert comme tribune au profit des thèses de Faurisson est ce en totale cohérence (ou incohérence on ne sait plus trop) avec ses prises positions passés clairement anti-israeliennes


Et là je crois qu’il faut se poser au moins deux questions… 

  • Le public de Dieudonné était il venu voir ce soir là l’artiste ou le militant ? Probablement un peu des deux, forcément…  J’ai trop souvent ri aux sketchs de Dieudonné pour croire que seul Le Pen et ses sympathisants étaient venus le voir ce soir là… 
  • Mais à l’avenir qui de l’artiste ou du militant va continuer de remplir les salles ?  La question a son importance. Pour ma part, si j’aurais pu imaginer assister au spectacle de l’artiste je me vois mal payer pour assister à ce type de tribune politique.
    L’évolution future du public de Dieudonné risque d’être un sujet pas inintéressant à surveiller dans les mois à venir…
2- Faurisson et l’antisémitisme

En réalité je ne vais pas vous faire un long récit des thèses de Robert Faurisson. 
Car pour vous faire une idée sur le bonhomme le mieux est encore probablement de le lire

Il dispose d’un biographie extrêmement fournie(mais nécessairement sujette à caution) sur wikipédia 

Il se voit également consacrer quelques lignes dans l’encyclopédie Larousse
Pour faire bref l’homme, qui se présente comme un révisionniste, est l’un des fers de lance de la « pensée » négationniste en France. 
 
Il considère en substance  que la déportation des juifs pendant la seconde guerre mondiale relevait d’une volonté de les éloigner mais pas de les exterminer. Il n’a d’ailleurs pas hésité à affirmer que :

« le mythe des chambres à gaz est une gredinerie ». 

Mais l’on ne peut rien comprendre à la pensée de négationniste de Faurisson sans en aborder le versant antisémite

Pour plus une analyse critique de Faurisson je ne peux que inviter à aller consulter l’excellent « Pratique de l’histoire et des dévoiements négationnistes ».

3- Complotistes et falsificateurs
 Il ne s’agit cependant pas de confondre Dieudonné et Faurisson.
Le premier a d’ailleurs eu l’occasion de préciser que sa pensée n’était pas superposable avec celle de son invité de vendredi.
Il s’agit donc de trouver ce qu’il y a de commun entre eux. 


Or on peut prendre la chose par n’importe quel bout sans jamais s’éloigner d’une équation relativement simple :
  • Il y aurait un complot ourdi par des élites visant à faire croire à la Shoah (dans la droite ligne notamment des Protocoles des sages de Sion)
  • Ce complot aurait présidé à la création d’Israel en lui offrant une justification 
  • Les palestiniens seraient les victimes de ce complot cautionné par l’occident
Comment dans ces conditions ne pas être tenté d’interpréter les récentes déclarations de Faurisson (lorsque N. SArkozy avait évoqué la possibilité que chaque enfant francais ait en charge la mémoire d’un enfant juif exterminé) :
« Je suggère que dans le droit fil de l’initiative de N. Sarkozy soient prises, sans plus attendre, les deux décisions suivantes : chaque classe d’enfants des écoles juives de France, d’Israël et d’ailleurs prendra en charge la mémoire d’un enfant palestinien assassiné » [source]

S’il s’agit de se battre contre les thèses farfelues des négationnistes et autres complotistes paranoïaques il faut également garder l’oeil ouvert face à des histoires romanesques trop séduisantes.

Car les falsificateurs ne sont pas dans le seul camp des négationnistes. 

Des aveux encore récents de Misha Defonseca  à la romance inventée d’Herman Rosenblat on trouve aussi des mystificateurs du coté de ceux qui ont raconté leur version de l’holocauste. 
 
Si l’histoire inventée de l’auteure de « survivre avec les loups » est encore dans les mémoires, celle d’Hermann Rosenblat n’est parue dans la presse que ce matin. 
 
Ce survivant du camp de Buchenwald avait imaginé une romance qui serait survenue entre lui et une femme qui l’aurait nourri au travers des grilles du camp et prévoyait de la publier sous la forme d’une autobiographie avant de passer récemment aux aveux.
Ciné

[avant première] Louise-Michel

Ce soir je suis allé voir Louise Michel. 
Pas La Louise Michel hein, elle est morte d’ailleurs.
Pas LouiseMiches non plus, elle habite trop loin de chez moi.
Non.
Ce soir je suis allé voir en avant-première  Louise-Michel le nouveau long métrage de Gustave Kervern et Benoit Delépine dont la sortie est prévue le 24 Décembre. 
Et croyez-moi j’ai rarement eu un aussi beau cadeau de Noel. 
 


 Louise-Michel est un film déjanté qui a obtenu le prix du scénario au festival de San Sebastian, concourt dans divers festivals et collectionne le bonnes critiques.
 
Il part d’une idée simple mais diablement efficace :
 
Les ouvrières d’une usine ont un matin la désagréable surprise de découvrir leur usine vidée.
Leur patron a délocalisé et s’est enfui. 
Ivres de colère elles décident de se réunir et se rendent compte très vite que les 2000 euros qui leur sont accordés à titre d’indemnité ne les méneront pas bien loin. 
L’une d’entre elles, Louise, propose alors de mettre en commun cet argent et d’engager un professionnel pour tuer le patron.  
Par hasard, elle rencontre Michel qui se prétend tueur à gages et décide de lui confier le contrat. 
Ensemble ils vont découvrir que zigouiller le patron n’est pas une chose si facile.


De cette fable cruelle, qui n’est pas sans rappeler le couperet de Costa Gavras les deux réalisateurs ont réussi à tirer un scenario cynique et terriblement inventif qui réussit l’exploit de ne pas s’essouffler.

Je vous prévient cependant, l’humour de Louise-Michel est terriblement méchant et ne respecte rien ni personne.
Si vous n’aimez pas les blagues cruelles  sur les idiots, les handicapés, les animaux ou les mourants passez votre chemin.  

Sinon courez-y, ce film est vraiment très drole.

D’autant que le couple de premiers rôles formé Par Yolande Moreau et le  génialissime Bouli Lanners fonctionne particulièrement bien.

Il n’est guère étonnant dans ces condition que Benoît Poelvoorde, Albert Dupontel, Matthieu Kassovitz et Philippe Katerine aient accepté de faire des apparitions en qualité de « guest-star de luxe ».
 

Si vous êtes fâchés avec l’esprit de noël ou tout simplement sujet à la mélancolie qui règne bien  souvent en cette période de l’année, voila  pour vous une énorme de dose de bonne humeur pour le seul prix d’un billet de cinéma.