à vif

Pas un pédé

Il doit être 8h30 lorsqu’elle frappe à la porte, trois coups secs. Univoques.

Je chasse les fantômes qui peuplent le rêve qui ne s’est pas encore tout à fait dissipé et je me laisse tomber sur le côté alors que mon pied touche le froid des tommettes. J’entends grogner à ma gauche et les souvenirs reviennent, d’un coup, comme une gorgée qu’on aspire.

Dans l’ordre, la semaine passée au ski, le retour sur une autoroute interminable, les Foo Fighters à tue-tête dans les enceintes  et des bagages jusque sur les genoux. Puis le retour en ville, sacs sur le dos et dans une main, une clé dans l’autre qui s’engouffre dans la serrure.

Sur le moment, je ne suis pas fâché de rentrer.  En fait, j’éprouve le soulagement caractéristique de celui qui va retrouver le confort de sa routine. Si l’on part en vacance, c’est aussi pour avoir le plaisir de revenir.

Mais cette fois ça ne se passera pas de cette manière.

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à vif

L’enfant du diable

Patrick a l’impression d’être un enfant convoqué dans le bureau du directeur.

Les mains posées sur les genoux, le dos légèrement voûté, il tente de refréner l’impatience de son pied gauche qui ne cesse de vouloir battre la mesure.

Son œil est attiré par la lumière du dehors. Patrick voudrait sortir, là tout de suite et enfin passer à autre chose.

Par la fenêtre, une banderole claque au vent. Elle surmonte la petite toile verte d’une tente. Selon le vigile à l’entrée du tribunal, cela fait quatre jours à présent que ce papa fait  une grève de la faim. Depuis ce jugement qui lui a enlevé son fils.

Patrick a écouté l’histoire, sans manifester d’émotion particulière.

Qu’espère-t’il cet imbécile avec sa grève de la faim ? Que le juge revienne sur sa décision ? Il ferait mieux de faire appel, ce serait moins spectaculaire, mais ce serait utile au moins…

Patrick a d’autres choses en tête, comme ce gamin de quinze ans qui attend, les yeux rivés sur son Iphone, de l’autre coté de la porte capitonnée.

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Restes de soupe
à vif

Le Mal de Mer

Le mal de mer est arrivé le 24 décembre, peu après midi.

Les bancs de passants nageaient de droite et de gauche.
Les flots charriaient des paquets multicolores.
Au loin, des hauts parleurs hurlaient des chants de Noël désuets jusque dans la rue.
Je me suis accoudé au bastingage, déjà plus très sûr de la solidité de mes entrailles.

Ce n’est pas bien original de ne pas aimer Noël.
C’est banalement la période durant laquelle une moitié de la population se réjouit et fait la fête tandis que l’autre scrute la calendrier comme la trotteuse d’une montre
Il y a comme un darwinisme calendaire lors des fêtes de fin d’année.
Comme s’il fallait faire un tri pour distinguer ceux qui ont assez d’envie pour atteindre la rive de l’année prochaine.

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