Patrick a l’impression d’être un enfant convoqué dans le bureau du directeur.
Les mains posées sur les genoux, le dos légèrement voûté, il tente de refréner l’impatience de son pied gauche qui ne cesse de vouloir battre la mesure.
Son œil est attiré par la lumière du dehors. Patrick voudrait sortir, là tout de suite et enfin passer à autre chose.
Par la fenêtre, une banderole claque au vent. Elle surmonte la petite toile verte d’une tente. Selon le vigile à l’entrée du tribunal, cela fait quatre jours à présent que ce papa fait une grève de la faim. Depuis ce jugement qui lui a enlevé son fils.
Patrick a écouté l’histoire, sans manifester d’émotion particulière.
Qu’espère-t’il cet imbécile avec sa grève de la faim ? Que le juge revienne sur sa décision ? Il ferait mieux de faire appel, ce serait moins spectaculaire, mais ce serait utile au moins…
Patrick a d’autres choses en tête, comme ce gamin de quinze ans qui attend, les yeux rivés sur son Iphone, de l’autre coté de la porte capitonnée.
Et puis le juge des tutelles en face de lui, qui le fixe de ses yeux gris acier, paré de cette expression à la fois dure et solennelle derrière laquelle s’abritent ceux qui ont le pouvoir de juger.
Le juge répète sa question.
Vous êtes son oncle. La seule famille en état d’accueillir cet enfant. A défaut je n’aurais d’autre choix que de le déclarer pupille de l’état et de le placer au service de l’aide sociale à l’enfance qui aura charge de le placer en foyer. Êtes-vous certain de votre décision ?
Le juge des tutelles perd son temps. Patrick ne reviendra pas sur sa décision. Ce gamin, qu’il connait à peine est probablement fou comme sa mère.
Ce n’est pas étonnant si le sort s’acharne sur lui, si ses parents sont morts.
C’est l’enfant du diable.