Ciné, la classe

La rafle / Liberté [critique croisée]

Le calendrier des sorties au cinéma est parfois fait d’une manière étrange, puisque deux films bien différents sur les crimes nazis durant l’occupation en France sont à l’affiche en ce moment. 
                            
La Rafle de Roseline Bosch a bénéficié d’une couverture médiatique assez importante, à l’inverse de Liberté de Tony Gatlif sorti dans des conditions plus discrètes.
Plutôt qu’un simple comparatif qui n’aurait pas grand sens, je vous propose quelques arguments qui n’ont d’autre but que de vous convaincre qu’il serait dommage de ne pas voir successivement l’un et l’autre tant il se complètent bien.

  • La Rafle
J’avais beaucoup regretté d’avoir manqué la belle occasion qui m’étais proposée voici quelques semaines par Vincent.   
Mais j’ai enfin pris le temps de voir la Rafle à l’occasion d’une projection-débat organisée hier soir par le MRAP Vaucluse grâce à la gentille équipe du cinéma VOX
Pas besoin d’entrer dans le détail de la trame de celui-ci, dont l’objet est de relater les évènements de la Rafle du Vélodrome d’hiver en 1942. 
Les moyens mis en œuvre sont à la hauteur de la tache en dépit d’une exécution assez académique. 



De l’infirmière généreuse jouée par Mélanie Laurent au médecin sioniste campé par Jean Réno en passant par le  père de famille communiste incarné par un Gad Elmaleh que l’on aimerait voir plus souvent dans un jeu aussi sobre chaque personnage a ici vocation à représenter un archétype de la société de l’époque. 
Le propos de la Rafle n’est pas le portrait psychologique de ses personnages mais plutôt de décrire des faits quitte à s’encombrer de séquences purement didactiques ou apparaissent successivement Pétain, Laval, Bousquet ou Hitler.



L’ensemble fonctionne plutôt bien grâce à des acteurs bien dirigés d’un bout à l’autre et aussi aux frimousses de ces enfants qui ne peuvent pas laisser indifférent. 
On sent que l’écriture de celui-ci a été particulièrement soignée à  ces répliques qui tombent juste et manquent de vous tirer des larmes par surprise. 

Les profs d’histoire qui n’en peuvent plus de faire visionner Nuit et Brouillard à leurs élèves ont désormais une alternative de grande qualité à leur proposer.


  • Liberté
Liberté, c’est l’histoire de P’tit Claude, neuf ans, dont les parents ont disparu depuis le début de la guerre et qui a trouvé refuge auprès de Tsiganes dont le convoi arrive, comme il l’a fait plusieurs fois auparavant pour les vendanges convoi arrivé dans le village situé en zone occupée dont Théodore (Marc Lavoine) est à la fois le vétérinaire et le maire. 
C’est aussi l’histoire de Mlle Lundi  (Marie-Josée Croze) institutrice et résistante qui est bien décidée à scolariser tout ce petit monde. 
Mais le monde à changé, le régime de Vichy a interdit la circulation des gens du voyage. 
Les contrôles de la police et de la gestapo s’enchaînent et la menace d’arrestation se fait de plus en plus pressante… 
TonyGatlif a choisi de s’attarder sur les gens du voyage ; ceux dont on ne dit généralement que trois mots dans les livres d’histoire qui concernent le seconde guerre mondiale. 
Pourtant, ceux-ci ont souffert tout autant de la campagne d’épuration menée par les Nazis et certains ne sortiront des camps qu’en 1946… c’est à dire bien après la libération.


Si le sujet vous intéresse, je vous invite d’ailleurs à prendre le temps de visiter le site « une mémoire française, les tsiganes pendant la seconde guerre mondiale »  qui a vocation à compléter le film. 

Au contraire de la Rafle, Gatlif a fait le pari de traiter ce sujet sous une forme relativement légère. 
Il offre au passage une galerie de personnage extrêmement attachante servie par des acteurs époustouflants. 
Marc Lavoine, dont j’ai toujours déteste l’image de chanteurs pour midinette prouve ici une fois de plus la grande justesse de son jeu. 
Le tout brosse un tableau très réaliste d’un certaine histoire de la campagne Française sous l’occupation.  
Mais liberté, c’est avant tout une bande originale virevoltante, qui mérite à elle seule le déplacement. 



Tour à tour joyeux, émouvant et grave Liberté choisit de s’en tenir à la « petite » histoire, et c’est ce qui fait sa force. 

Au contraire de la Rafle dont le prolos est plus large, le film de Tony Gatlif joue sur une gamme cinématographique beaucoup plus large. 
Entre l’objet historique ciselé que constitue la Rafle et la réussite artistique de Liberté il me semblerait dommage de faire un choix…
Foncez. 
 

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