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Vaine polémique sur le statut des beaux parents

Il y a dix ans une certaine frange de la société s’inquiétait de l’adoption du PACS.
La partie la plus conservatrice de la droite criait à la désintégration de la famille et pointait l’entrée dans notre droit d’un prétendu mariage homosexuel.
Ce faisant, ils occultaient quelque peu le débat de pure technique juridique, alors même qu’il était nécessaire.
Dix ans plus tard force est de constater qu’ils s’étaient trompés sur toute la ligne.
Le PACS, désormais purgé de ses erreurs techniques par la réforme du 23.06.2006, ne peut plus être confondu avec un prétendu mariage Gay puisqu’il concerne en grande majorité des couples de sexe différents.
En réalité, le PACS n’est pas le moins de monde assimilable à un mariage ; il a une nature contractuelle et des effets essentiellement patrimoniaux là où la fonction principale du mariage est de fonder une famille. 
 
On aurait pu croire que la droite conservatrice aurait retenu la leçon de son erreur. Mais il faut croire que dix ans suffisent pour oublier.
Alors qu’un avant-projet de loi propose de créer un statut légal pour les tiers, à l’intention des familles recomposées, quelle que soit leur composition, les mêmes agitent à nouveau cette question homosexuelle qui semble les obséder.

L’Express résume ainsi la question :

Un avant-projet de loi sur les droits des beaux-parents reconnaît pour la première fois la famille homoparentale, et suscite une vive polémique au sein de la majorité, Christine Boutin s’élevant contre « une façon détournée » de reconnaître l’homoparentalité. [source]

D’autres, à l’image de Laurent Hyafil, sont également opposés à ce texte, mais pour d’autres raisons plus louables.

Selon lui :
Certains actes non importants sont source de conflits importants. Le père ressent toujours mal le beau-père venir voir les professeurs, voire venir à ses côtés, à la place de la mère au Conseil de classe. La mère supporte mal que la belle-mère s’ingère dans la santé de ses enfants.
En laissant les beaux-parents agir au nom du parent pour des actes mineurs mais hautement symboliques, on ne fait qu’attiser certaines haines et certaines vengeances. [source]
Si je ne partage pas son point de vue, l’article de Laurent Hyafil présente une immense qualité : il s’appuie sur le texte de l’avant projet qui se destine à modifier la rédaction de plusieurs articles du code civil.

Si le texte était voté en l’état (ce qui n’est pas certain) l’article 371-4 du code civil serait désormais rédigé comme suit :
Article 371-4
L’enfant a le droit d’entretenir des relations personnelles avec ses ascendants ainsi qu’avec le tiers avec lequel il a résidé avec lui et un de ses parents et avec lequel il a noué des liens affectifs étroits. Seul l’intérêt de l’enfant peut faire obstacle à l’exercice de ce droit.
Si tel est l’intérêt de l’enfant, le juge aux affaires familiales fixe les modalités des relations entre l’enfant et toute autre personne, parent ou non. [les modifications sont en bleu]

Quant à l’article 372-2 il se présenterait de la sorte :
Article 372-2
A l’égard des tiers de bonne foi, chacun des parents est réputé agir avec l’accord de l’autre, quand il fait seul un acte usuel de l’autorité parentale ou qu’il autorise un tiers à effectuer un tel acte.
L’accord des deux parents est requis pour effectuer les actes importants de l’autorité parentale. Sont réputés tels les actes qui engagent l’avenir de l’enfant, notamment quant à sa santé ou à son éducation, ou qui touchent à ses droits fondamentaux.
[photo]

Autant vous le dire dès à présent, je regarde cette initiative gouvernementale avec une inhabituelle bienveillance.
Pas simplement parce que j’ai la chance de connaitre un nombre certain d’homosexuels.
Pas simplement parce que certains me donnent la joie de me considérer comme leur ami.
Pas même parce qu’ils ont réussi à me convaincre qu’ils n’étaient pas beaucoup plus mal armés que moi pour devenir un jour parents.
Non. Ce qui motive surtout ma pensée c’est l’intime conviction qui est la mienne de ce que cette loi ne fait en réalité que prendre acte d’une réalité déjà vivace, celle d’une société au sein de laquelle la notion de famille n’est plus définie par la stricte notion de mariage.

Cette réforme dépasse très largement la simple question homosexuelle.
Il s’agit de donner une reconnaissance véritable aux liens étroits d’affection qui fondent désormais l’idée de famille bien plus que la question du mariage.

Bien sûr, comme toute réforme, elle constitue un risque, mais je crois également aussi une chance.
Celle, par exemple de permettre plus aisément le placement d’un orphelin chez un proche plutôt que dans un foyer.
Voila un texte que j’aimerais fort voir adopter.

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