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La faute inexcusable du Crédit Agricole.

Il est intéressant cet article du Parisien paru hier que ceux qui suivent mon Twitter on peut être déjà aperçu et qui, contrairement à ce que l’on pourrait penser, n’a rien à voir avec la crise financière. 
Intéressant, mais pas très clair, d’autant que le journaliste semble avoir survolé son sujet et du coup n’avoir pas très bien compris l’affaire.
Pour ces deux raisons il ne me semble pas inutile d’apporter en quelques mots un certain nombre d’éclairages. 

Que nous apprend le dit article tout d’abord ? 
Extraits : 

« Braquage et prise d’otages. Les employés de l’agence du Crédit agricole d’Excideuil (Dordogne) se souviendront longtemps de ce 7 avril 2004. Deux braqueurs pénètrent dans les locaux avec une clé, prennent en otages les dix employés puis disparaissent avec 132 000 €. Premier problème : la clé utilisée par les malfrats avait été dérobée trois semaines avant le braquage. Deuxième problème : la direction régionale de la banque, au courant de ce vol, n’avait pas changé les serrures ni informé le personnel, qui demande des explications. »

(…) « MISE EN CAUSE par des salariés après un braquage et condamnée en 2007 par la justice pour « faute inexcusable », une caisse du Crédit agricole a vu confirmer ce jugement par la Cour de cassation le 2 octobre. »

En ce qui concerne les faits une précision s’impose, puisque l’action en recherche de faute inexcusable de l’employeur, prévue par les articles L 452-1 et suivants du code de la sécurité sociale est ouverte exclusivement aux victimes d’accidents du travail ou de maladies professionnelles ou à leurs ayant-droit.
Cela signifie donc nécessairement :
  • qu’un  salarié du crédit agricole a malheureusement été blessé à l’occasion du braquage (ce que confirme un second article trouvé chez France 3)
  • que lui-même où l’un de ses proches a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale (seul compétent pour connaitre d’une telle action) d’une action en « reconnaissance de faute inexcusable ».
Derrière le terme un peu spectaculaire de « faute inexcusable de l’employeur » se trouve un principe juridique dont la définition actuelle réside dans des arrêts (une quinzaine tous plus ou moins identiques) rendus le 21.02.2002 par la chambre sociale de la cour de cassation à l’occasion du scandale de l’amiante

Il s’agissait alors de trouver un mécanisme susceptible de permettre l’indemnisation des victimes de maladies professionnelles causées par une exposition prolongée à de l’amiante  en dehors de tout comportement « actif » de l’employeur. 
En cette occasion la cour de cassation a dégagé un principe qui n’a plus varié depuis et considéré : 
« qu’en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l’employeur est tenu, envers celui-ci, d’une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par l’entreprise ; que le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable au sens de l’article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale, lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver » [source]
En résumé, depuis cette date en cas de maladie professionnelle ou d’accident du travail commet une « faute inexcusable » tout employeur dès lors : 

  • qu’il pouvait avoir conscience du danger
  • qu’il n’a pas pris les mesures qui auraient pu protéger le salarié
C’est précisément cette définition que l’on retrouve dans l’arrêt de la cour d’appel de bordeaux rendu le 14.06.2007 que vient de confirmer la cour de cassation :
« Il apparaît à l’évidence que le Crédit agricole (…) n’a pris aucune précaution pour assurer la sécurité de ses employés alors qu’il aurait dû avoir conscience du danger auquel ils étaient exposés. Ce faisant, il a commis une faute inexcusable. »
Là où l’affaire devient intéressante c’est qu’elle semble étendre la notion de faute ienxcusable à un cas inédit : celui des violences perpétrées par un tiers ! 

Malgré toutes mes recherches je n’ai malheureusement pu me procurer cet arrêt qui n’est pas encore publié. (Si par le plus grand des hasards… les commentaires sont ouverts)
Si ce que je pressent se confirme à la lecture de l’arrêt, ce sont les chefs d’entreprise qui vont à voir du souci à se faire… 
Oui. J’ai failli oublier…
En cas de faute inexcusable si l’entreprise n’est pas en état d’indemniser la victime l’employeur est responsable sur ses biens personnels… Gasp !


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