festivalsons, reverie

Dandy clochard

Les rues encombrées du festival d’Avignon sont aussi agaçantes pour l’homme pressé qu’elles peuvent être fascinantes pour celui qui garde les yeux ouverts.Surtout, elles peuvent être le lieu des rencontres les moins attendues.

Il est assis sur le rebord d’une marche bien trop petite pour lui, adossé à une porte fermée qui ne semble désormais appartenir qu’à lui.

Son pantalon très court qui les découvre les chevilles est d’un gris éclatant. Je détourne la tête sans même m’en apercevoir alors que je passe à sa hauteur.
Il y a dans son regard l’infinie certitude de celui qui sait que le monde est à lui. Sa main tendue sur son genou ne demande pas : elle semble attendre un dû.
Je ne fouille pas dans ma poche puisque je sais déjà qu’elle est vide, et pourtant, inexplicablement je le regrette un peu.
Pourtant je passe ma main le long de ma cuisse comme pour me convaincre de ce vide qui ne me satisfait pas.
Il remarque que je lui prête attention et son visage se fend en un sourire radieux.
La fossette qui se trouve sur ma joue droite apparaît alors que ma bouche lui répond.
Puis, je reprends ma marche, doucement, car à ce stade il n’y a rien d’autre à faire.

Pour une raison que je ne m’explique pas encore j’envie un peu sa place lorsque je met la clé dans la serrure.
Il est vingt heures, déjà.

à vif, festivalsons, reverie

Mes pas dans ceux de la foule…

Il y a cette odeur mêlée de crasse de nourriture et de sueur qui semble vouloir s’infiltrer dans tout mon être. Et cette foule qui a envahi les rues et ne cesse depuis de ralentir mon pas. Ces tracts déchirés aussi qui jonchent le bitume et se collent à mes semelles.

Il est dix neuf heures trente à l’horloge de la gare d’Avignon, je viens de descendre de mon train. Je passe lentement ma main légèrement moite sur ma nuque endolorie par une journée de stress et de sollicitations incessantes. Et je les regarde ; ils portent tous des costumes. Oui tous, qu’ils soient acteur acteur sous une cape et un chapeau à plume ou festivalier en sandale et bermuda ils portent tous sur eux le signe distinctif de celui qui participe à cet événement d’ampleur qu’est le festival d’Avignon. Et puisqu’ils portent tous un costume sauf moi, forcément, j’ai l’impression que c’est moi en fait qui porte le déguisement. Car je porte un costume en effet, celui trop classique qui caractérise l’homme qui sort du bureau et qui ce soir, au contraire des autres jours, m’isole de cette foule qui ne pense qu’au théâtre.

Des yeux verts engloutissent mon regard un instant trop infime, déjà par un travelling arrière brutal la foule réapparaît autour de moi. La propriétaire des yeux me tend un tract que je mets machinalement dans ma sacoche. Il ira bientôt rejoindre ceux que j’ai laissé sur le guéridon dans l’entrée et que je ne lirai probablement pas.

J’arrête ma marche un instant.
Il y a de la musique tout près.
Et des gens qui dansent aussi.
C’est beau une ville qui ne pense qu’au théâtre.
J’aurais vraiment dû poser mes congés cette semaine…

 
 

(quelques tracts -divers-collectés ça et là)

Le programme du « off » c’est par . Ça se lit avec gourmandise souvent. Avec étonnement aussi.
Et un peu de frustration parfois.