à vif, Billets, coup de gueule

De l’inégalité face aux guichets postaux

Il y a toujours un coté un peu beauf à critiquer la Poste, mais à l’instant je suis vraiment en colère et je crois que c’est parfaitement justifié. 
Et puis à bien y réfléchir j’ai déjà  dit du mal de la Poste un peu plus tôt dans ces pages
 
Pour éviter les clichés je vous promets cependant que ce billet ne contiendra pas une seule fois le mot « grève », enfin pas deux fois le mot grève. Bref, vous m’avez compris. 
 
Ce matin j’étais debout à 6 heures. 
J’ai donc décidé de profiter des quelques heures qui me séparaient de mon train du matin pour me rendre à la Poste et faire plusieurs opérations sur un compte épargne. 
 
Puisqu’elle est la plus proche de la gare je me suis rendu à la Poste centrale dont les locaux ont été fraichement rénovés. 
Je pénètre dans le grand hall, qui lors de la réfection a été débarrassé de ses files d’attente. 
Désormais il faut être muni d’un ticket pour accéder au guichets. 
Docile, je m’approche de la machine qui les distribue. L’engin comporte trois boutons  à coté desquels sont portées les mentions suivantes : 
  • Toutes opérations
  • Transferts d’argent Western Union
  • Retraits de colis / lettres
Je jette un œil sur ma droite pour constater que les produits d’affranchissement de type Chronopost et autres sont désormais vendus dans une sorte de boutique aménagée dans un coin en compagnie de calendriers d’Anne Geddes et de sacs à mains estampillés « Equitable ». 
 
Passée cette constatation, il ne me faut pas bien longtemps pour comprendre que le terme toutes opérations recouvre pudiquement l’ensemble des opérations de caisse d’épargne.
 
J’appuie sur le premier bouton et le ticket s’imprime il indique 8h33 et porte le numéro 007. Le chiffre me fait sourire et rassure à la fois, puis je lève la tête afin de connaitre le nombre de personnes qui se trouvent devant moi.
 
 [photo]

Trois cadrans surplombent les guichets.
  • Le premier indique 004. 
  • Le second 400
  • Celui du bas 701
Aux trois boutons correspondant donc trois numérotations différentes. 
Cela ne m’inquiète pas outre mesure, il n’y a selon toutes vraisemblance que trois personnes devant moi. 

Très rapidement d’ailleurs un guichet se libère de sorte que le panneau supérieur monte d’un cran, puis d’un autre quelque cinq minutes plus tard. 
L’heure avance, le hall s’emplit peu à peu et s’ouvre un autre guichet. 
Parmi les nouveaux entrants, je remarque une femme d’une trentaine d’années aux épaules couvertes d’un manteau dont la facture me plait particulièrement, presque autant en fait que ses yeux bleus qui aspirent mon regard.  
Le panneau monte d’un cran à nouveau pour indiquer 006.
Je regard ma montre. Il est 8h47. Mon train part à 9h03. Cela risque d’être un peu juste mais je ne doute plus de pouvoir effectuer mon opération avant de prendre mon train. 

Enfin les deux guichets se libèrent successivement de sorte que je me prépare à m’avancer.
Mais c’est le troisième panneau qui se déclenche cette fois. Et je vois  avec une surprise mêlée d’agacement le joli manteau surmonté des yeux bleus s’avancer vers l’un des postiers. 
 
Le panneau bruisse un fois encore pour faire apparaître le numéro 702. 

 [Photo]

L’intuition que j’avais eue à la vue des trois boutons se change immédiatement en certitude. Ces tickets qui remplacent les files d’attente ne sont qu’un moyen de trier les usagers en rendant prioritaires certaines opérations jugées plus importantes  ou plus rentables. Et peu importe les autres. 
J’ai attendu quelques minutes encore, autant que le temps me le permettait, jusqu’au numéro 706 en fait.
 
Lorsque j’ai quitté la poste j’avais le mot scandale sur les lèvres de sorte que je n’ai pu m’empêcher de le crier un peu fort. 
Avant de sortir, j’ai cependant pris soin de faire don de mon ticket à un inconnu qui en a semblé enchanté.
 
Je ne connais pas d’autre bureau de Poste à pratiquer pareille discrimination entre ses clients. 
J’espère en réalité que celui-ci est le seul.
Je ne prétends pas que les files d’attente surchargées soient une expérience fort agréable.
Mais dans les files d’attente nous étions tous égaux.
 
Ça doit être ça la Poste du troisième millénaire : un seul guichet trois modes de traitement différents.

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