brèves, societé

Toi aussi travaille gratuitement

Lu à l’instant dans le Monde :
British Airways, qui a fait état le mois dernier d’une perte annuelle record, a annoncé mardi avoir demandé à ses salariés de travailler gratuitement. La compagnie aérienne bataille pour sa « survie » dans des conditions de marché difficiles. Cet appel aux employés de la compagnie en Grande-Bretagne leur demande de se porter volontaires pour une période allant d’une semaine à un mois de congé sans solde ou de travail non payé. [source]
Cette brève, qui est aussi un signe des temps m’inspire tout à la fois une observation et une réflexion. 

Tout d’abord j’observe qu’il ne s’agit pas d’une première.
D’autres sociétés déjà avaient proposé, voire même imposé à leurs salariés de renoncer à des droits acquis au nom de l’intérêt supérieur de l’entreprise. 

En décembre 2007 par exemple, Continental avait fait voter, puis adopter une motion par ses salariés afin d’augmenter la productivité des ses usines :
Oui au passage aux 40 heures. Les trois quarts des 1 300 salariés de l’usine de pneumatiques Continental à Sarreguemines (Moselle) se sont prononcés en faveur d’une augmentation du temps de travail, accompagnée d’une revalorisation de leur rémunération. Un plébiscite que François Gérard, le directeur de l’usine, explique par la volonté des salariés « de préserver un bon emploi et un salaire attractif » (en moyenne 30 000 euros bruts par an pour un ouvrier, avec un intéressement équivalent à 0,6 à 0,8 mois de salaire). [source]
Continental.
Oui cette même société qui, après avoir fait repasser son usine de Clairoix aux 39 heures, projette à présent de la fermer dans la cacophonie que l’on sait…


Ce qui choque bien sûr c’est le sacrifice demandé au salarié sans qu’aucune contrepartie ne lui soit offerte. 

Le marché qui lui est proposé par l’entreprise en échange d’une renonciation à ses droits est nécessairement aléatoire puisque l’entreprise ne peut par hypothèse l’assurer de sa situation financière future.

Qu’il s’agisse demander au salarié d’augmenter sa charge de travail ou de renoncer à tout ou partie de sa rémunération il s’agit toujours d’un pari sur le futur de la société. 
En d’autres terme, s’il accepte le salarié investit dans sa propre société, dans l’espoir d’un retour sur investissement qui est la sauvegarde de son emploi. 

La voilà ma réflexion.
Il me semble, humblement, discerner dans ce phénomène un mélange des genres malsain à l’occasion duquel un salarié se voit proposer d’assumer le rôle qui est par nature celui de l’associé (qu’il soit ou non un actionnaire).

La différence entre eux n’est pas mince pourtant ;
  • puisque le premier,  outre sa situation de dépendance économique par rapport à son employeur, est avant tout  lié à celui-ci par un lien de subordination  (c’est la définition même du contrat de travail).
  • là où l’associé dispose d’un pouvoir de contrôle sur la société à hauteur du nombre de ses parts
Si l’on considère légitime qu’un chef d’entreprise aussi bien que les associés d’une société bénéficient de rémunérations importantes pour la simple raison qu’ils prennent le risque  d’investir dans celle-ci, il me parait tout aussi légitime de récompenser les salariés qui choisissent d’assumer leur part dans cette prise de risque, et -pourquoi pas- de les associer à la prise de décisions.

Voilà qui permettrait de sortir de cette impression vivace et pas forcément fausse que dans certaines entreprises les salariés servent de simple variable d’ajustement à des fins comptables. 

Vous me trouvez utopiste ? 
Peut être… 
Pas encore totalement cynique en tous cas.
brèves, nos droits

Où je découvre la publicité vivante [en retard]

Parfois j’ai vraiment l’impression de débarquer.
Ce matin par exemple alors que la café coulait je me suis retrouvé un peu par hasard à lire un article intitulé « comment gagner de l’argent sans travailler » sur le portail MSN 

L’article évoquait notamment la possibilité d’être rémunéré pour porter un tatouage à l’effigie de telle ou telle marque et renvoyait vers le site TatAd qui propose ce genre de prestation.

Trois secondes de recherche plus tard je découvre que cette société existe depuis 2004, de sorte que de nombreux articles en font d’ores et déjà mention.



Environ trois secondes plus tard  je pensais déjà à autre chose lorsque j’ai appris la chose suivante chez Korben : 

Le site MyMMOShop qui propose de vendre de l’or […] dans le jeu WoW gagne tellement bien sa vie qu’il a payé Anna Morgan, une actrice porno russe pour se faire tatouer le logo de la société et l’adresse du site web, sur ses seins. [source]

J’ai tout d’abord pensé que j’avais quelques trains de retard sur ce coup là. 
Et aussi que cette manie de commercialiser les tatouages est décidément étrange. 
 

C’est à cet instant que la déformation professionnelle m’a rattrapé sous la forme d’une question simple ;  « est-ce bien licite tout ca ?« .

Mes cours de fac ne sont pas loin, alors j’ai immédiatement pensé à ce jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance (TGI) de Paris le 3.06.1969 dont les étudiants en droit des obligations se souviennent probablement.  
Un monsieur « X » avait engagé une demoiselle Z.  âgée de 17 ans, pour tenir le role d’une jeune fille tatouée dans une séquence du film « Paris Secret ».
Pour l’anecdote, il s’agissait clairement d’un film « pour adultes »…
Aux termes du contrat, une tour Eiffel et une rose devaient être tatouées sur une des fesses de la demoiselle Z, le tatouage devant être enlevé quinze jours plus tard par un chirurgien et devenir la propriété de la société Ulysse Production.

Rassurez-vous ; il y a une justice ; quelques années plus tard les méchants producteurs ont été condamnés à indemniser cette demoiselle Z dont on peine à imaginer les souffrances. (Cass. civ. 1° ; 23.02.1972)

Mais avant cela le TGI avait purement et simplement annulé le contrat dans son jugement du 3.06.1969 rendu sur le fondement de l’article 1128 du code civil, celui là même qui fonde par ailleurs la prohibition du contrat de « mère porteuse » et selon lequel :

Il n’y a que les choses qui sont dans le commerce qui puissent être l’objet des conventions. [source]
Bien que l’exemple du « tatouage publicitaire » n’implique pas que celui-ci soit prélevé j’ai donc tendance, à priori, à considérer qu’un tel contrat serait nul s’il était conclu en France pour la simple raison que le corps humain n’est pas, en principe, « dans la commerce juridique »

Voilà pour les considérations juridiques. 
Mais indépendamment de cela je ne peux m’empêcher de m’interroger quant à l’efficacité de ce type de publicité. 

La question dépasse largement ma compétence : je concède ma plus parfaite ignorance en matière de marketing. 

Mais je ne crois pas qu’un tatouage, même habilement placé, puisse véhiculer une bonne image de la marque concernée dès lors qu’il constitue ostensiblement une utilisation commerciale du corps humain. 

 [photo]

Réflexion faite, Je connais certains Geeks qui accepteraient volontiers de se faire payer pour un pareil tatouage…
brèves, et hop, et moi

[Note de service] Agenda avant reprise des hostilités

Mis à part quelques sympathiques réactions dans les commentaires c’était assez calme ici depuis quelques jours.
Pour tout vous dire depuis le premier Avril dernier mes conditions de travail ont un peu évolué. 

L’avocat auprès duquel je travaille comme juriste a décidé de modifier ses conditions d’exercice avant de m’embarquer dans sa valise… ce qui augmente d’autant mes responsabilités… et ma charge de travail. 
Le résultat est là, une bonne dizaine de notes d’actualité inachevées et vouées à le rester, quelques autres bien au chaud dans les tiroirs, pas mal de fatigue et encore plus de travail abattu.

Avant de reprendre le rythme des hostilités je ne résiste pas à l’envie de vous faire profiter de mon agenda de la semaine dernière :

Mardi 12 :
Je tombe par hasard sur un article qui me ferait presque revenir sur la sympathie que j’ai pour le Nouvel Obs.
Qui sont ces gens qui prétendent juger un homme d’après la marque de sa cravate ?
Le soir venu je prends un instant pour sortir de son tiroir cette cravate italienne en soie que des amis m’ont offert l’année dernière.
Note pour plus tard : penser à la tenir à l’écart de tout objectif photographique.

Mercredi 13 : 
La lecture des nouvelles du jour me fait passer d’un lien à l’autre, comme souvent. 
Il y a d’abord cette histoire incroyable qui pourrait faire un sacré film.  

Puis deux informations successives, pourtant pas de la première fraicheur, me sautent aux yeux.
Un historien tente de réfuter l‘authenticité du célèbre buste de Néfertiti alors qu’Eco 89 démonte le mythe récent du Moleskine.
Je n’ai pas l’âme d’un conspirationniste. Mais, un instant, je me dis qu’on n’est jamais vraiment sûr de rien, et cette idée me plait assez.


Jeudi 14 : 
Jour de rendez-vous. 
Un client m’interroge au sujet des hélicoptères qui patrouillent au dessus de Tarascon.
Il me fait remarquer que ce dispositif est habituellement utilisé lorsque se produit une  évasion au centre de détention voisin.
J’acquiesce distraitement, pressé de retourner dans mon bureau.
Lorsque je traverse la salle d’attente une heure plus tard, le client est parti. Ses successeurs m’assaillent de question sur l’identité de l’évadé et son degré de dangerosité.
Depuis ils ont appris à se méfier des touristes allemands.

Pendant ce temps, la participation de Carrie Préjean  au concours Miss univers est confirmée. 
Je me dis que cette opinion publique qui n’a pas de scrupules à voter massivement contre le mariage Gay mais hurle au scandale lorsqu’une personnalité se prononce publiquement dans le même sens mérite de sacrés coup de pieds aux fesses.

Vendredi 15 : 
Premiers picotements dans le fond de la gorge.
Je réalise avec effroi que je n’ai jamais pris un jour de congé maladie de ma vie.
Mes dernières forces me permettent toutefois de me rendre jusqu’à mon futur bureau.
25 m² de superficie, une jolie vue sur le jardin ; je peine à réprimer une expression gourmande.

Samedi 16 et dimanche 18 : 
Tombé au champ d’honneur.
Je suis l’un des premières victimes de la grippe AAA51. (soit le numéro de série du climatiseur de mon bureau)
Huit paquets de mouchoirs en papier figurent aux rangs des dommages collatéraux.

Je redécouvre les joies d’un week-end passé sous la couette et devant la télévision.   
Entre deux somnolences je me laisse aller à regarder des films… inattendus.
Je crains quelque peu pour ma santé mentale.

Lundi 19 : 
J’ai bien avancé et me réjouis de profiter de ma « pause blogging » du midi.
D’autant qu’un excellent article paru dans le Monde m’inspire des commentaires amusés.
Le temps de traverser la route pour acheter une salade et je retrouve l’immeuble plongé dans le noir.
Au termes d’une brève inspection qui me conduit des compteurs électriques jusqu’au fenêtres du voisinage, je finis par comprendre que des salauds de grévistes m’ont coupé le courant.

Résigné, je plonge le nez dans ma salade puis dans un code civil.

Lorsque ma secrétaire arrive à 14h15 c’est son tour d’avoir une mauvaise surprise ; le courant vient d’être rétabli ; la sieste sera pour un autre jour. 
Salauds de grévistes !